Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices

Résumé : Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices. L’athéisme qui affirme que toutes les religions sont fausses. Le relativisme qui croit que toutes les religions se valent. Le syncrétisme qui pense qu’une nouvelle synthèse s’impose.

Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices. L’athéisme qui affirme que toutes les religions sont fausses

« Toutes les religions sont des « illusions » inventées par les hommes au cours des siècles pour se consoler des malheurs qui les accablent : malheurs infligés par la nature (famines, tremblements de terre, maladies, mort) ou par le milieu social (malentendus, injustices, jalousies, guerres). Les hommes ne peuvent s’empêcher de rêver à un Dieu qui leur procurera le bonheur dans un autre monde.

Trois philosophes allemands du XIX° siècle, Marx, Nietzsche et Freud, se sont attachés à démontrer les mécanismes inconscients qui auraient amené nos ancêtres à inventer cette illusion. Ils soupçonnent l’attitude religieuse d’être une attitude maladive, infantile, liée à toutes les misères d’une humanité encore mal dégrossie. C’est pourquoi Paul Ricoeur a appelé « maîtres du soupçon » ces trois philosophes allemands qui ont profondément marqué la conscience européenne depuis un siècle.

Cette pensée est traversée par l’espoir qu’avec les progrès de la science et de l’économie, les hommes pourront enfin se débarrasser de cette illusion mensongère. Beaucoup d’esprits sont persuadés que les progrès de la science favorisent le déclin des religions.

Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices. Le relativisme qui croit que toutes les religions se valent

Toutes les religions sont des expressions différentes d’un même besoin religieux profondément incrusté dans la psychologie humaine – besoin qui correspond d’ailleurs à une réalité : il existe un Être divin dont on ne peut pas dire grand-chose. Malheureusement les hommes ne se sont pas résignés à ce silence. Ils ont inventé différents discours sur Dieu, aussi faux les uns que les autres : ce sont les théologies des différentes religions.

Ces religions sont vraies dans la mesure où elles affirment l’existence d’une Réalité mystérieuse qui dépasse notre entendement; elles sont fausses dans la mesure où elles prétendent monopoliser la Vérité : elles dégénèrent alors presque inévitablement en fanatisme ou en intolérance.

On peut dire que cette position est celle qui vient spontanément à l’esprit de celui qui se penche sur l’histoire des religions. On ne sera donc pas étonné de la trouver énoncée par un grand nombre de philosophes – notamment au XVIII° siècle, à une époque où l’Europe n’a pas encore oublié les terribles méfaits des guerres de Religion et où elle découvre davantage l’univers religieux des autres continents. Telle est la pensée de Voltaire, de Kant ou de Robespierre, mais aussi, plus près de nous, celle d’Alain ou d’André Maurois.

Notons que les relativistes ne sont pas forcément méprisants vis-à-vis des différents folklores religieux. Les peuples, pensent-ils, en ont besoin pour vivre leur expérience spirituelle : ils ont besoin de rites, de prêtres, de pèlerinages et de croyances. Mais ils devraient avoir le bon sens d’admettre que les croyances et les rites des autres religions sont tout aussi valables.

Gandhi changeait chaque soir de livre sacré pour animer la prière de ses disciples : tantôt la Bible, tantôt le Coran, tantôt le recueil des Upanishads, persuadé qu’on y retrouvait toujours le même idéal fondamental de fraternité universelle.

On dit souvent d’une telle attitude qu’elle est syncrétiste, en ce sens que leurs adeptes considèrent qu’il y a quelque chose à prendre en chacune des grandes religions de l’humanité. Il existe néanmoins un syncrétisme qui va plus loin.

Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices. Le syncrétisme qui pense qu’une nouvelle synthèse s’impose

Le véritable syncrétisme essaie en effet de bâtir un système qui synthétise et harmonise plusieurs courants spirituels de l’humanité.

Dès les origines du christianisme par exemple, des fidèles ont essayé de concilier les données de l’Évangile avec les doctrines religieuses en vogue. C’est ce qu’on appelle la « gnose chrétienne ». Au II° siècle, saint Irénée, second évêque de Lyon, écrit tout un traité pour combattre les hérésies gnostiques qui s’infiltrent à l’intérieur des communautés chrétiennes de son temps.

Face à la diversité des religions : 3 attitudes réductrices. Le gnosticisme qui procurait une connaissance qui sauvait

Les gnostiques estimaient que la foi des chrétiens « ordinaires » était une foi trop simple, insuffisamment élaborée, qu’elle ne tenait pas compte de l’enseignement « secret » que Jésus avait dû donner à ses apôtres en dehors de la foule. Il fallait y substituer une science véritable (le terme de gnose désigne pour les Grecs le vrai savoir). Cette science rendait le chrétien spirituel, « pneumatique »; elle lui procurait une connaissance supérieure qui le sauvait.

Pour le gnostique en effet, le salut ne consiste pas essentiellement dans la conversion de notre cœur de pierre en cœur de chair grâce à l’Esprit que Jésus nous donne, mais dans l’acquisition d’un savoir ésotérique (c’est-à-dire réservé à des initiés). Jésus n’est plus le Médecin qui nous guérit du mal : il n’est qu’un Maître de sagesse qui apporte une connaissance que seule peut comprendre une élite.

On notera que l’acquisition de cette connaissance dispense la plupart du temps l’initié de tout effort moral véritable. D’ailleurs, pour la pensée gnostique, la faute n’existe pas. L’homme est souillé par le monde matériel dans lequel il évolue; mais cette souillure n’atteint pas son être profond : un lingot d’or reste pur, même quand il tombe dans la boue!

Nous assistons de nos jours à une véritable résurgence de ces gnoses du second siècle. Il suffit de penser à tous ceux qui essaient de montrer que la foi chrétienne n’est pas incompatible avec la croyance en la réincarnation.

La plupart des sectes fondées de nos jours se présentent comme apportant une nouvelle synthèse religieuse plus élaborée que les précédentes. C’est ainsi que Moon présente sa pensée comme une synthèse entre le christianisme occidental et la pensée taoïste. Il est vrai que ses méthodes de recrutement sont en complète opposition avec l’esprit de tolérance qui caractérise toujours une recherche spirituelle authentique. »

SOURCE : Abbé Pierre Descouvemont, Guide des difficultés de la foi catholique, Éditions du Cerf, Paris 2009, pp. 125-129.

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A propos Pierre Descouvemont 12 Articles
Pierre Descouvemont est un prêtre du diocèse de Cambrai et docteur en théologie. Il est auteur de nombreux ouvrages, poursuit actuellement un ministère d’enseignement (conférences, retraites) et anime des chroniques sur différentes radios chrétiennes. Il a ouvert en 2015 un site internet où il met à disposition nombre de ses enseignements.

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