Les trois défis présentés au cours des trois dernières semaines peuvent sembler être une montagne infranchissable. Un pasteur pourrait dire tout au plus qu’il se sent prêt à relever l’un ou l’autre, mais pas les trois en même temps. Par contre, si on considère les trois défis comme intégrés les uns aux autres, nul doute que cette vision des choses permettra de comprendre comment le Système des Cellules Paroissiales d’Évangélisation (SCPÉ) procède d’une approche d’intégration. Pour bien comprendre cette réalité, nous utilisons deux adjectifs: “intégral” et “intégratif”.
Le SCPÉ déploie une approche “intégrale” puisqu’il doit tenir compte, de toute façon, de l’ensemble des éléments qui le composent. Si l’un des éléments manque ou n’est pas bien intégré à la totalité, rien ne fonctionne, comme on le constate d’ailleurs avec le corps humain qui a besoin de chacun de ses systèmes organiques pour être en bonne santé et croître. Difficile d’imaginer le contraire.
Le SCPÉ est aussi “intégratif”. Le néologisme est nécessaire pour comprendre que les différents éléments sont intégrés à la totalité dans la mesure où ils fonctionnent et agissent de manière harmonieuse et cohérente dans un dynamisme unificateur et englobant. En soi, il n’y a rien à “faire”, bien qu’il y ait une responsabilité à “laisser agir” la grâce du Christ. Le système organique, “intégral” et “intégratif”, se développe de lui-même. Par contre, il s’épuise, perd de la force ou tombe malade si l’un des éléments vient à dysfonctionner. Il est donc nécessaire de s’approprier cette vision d’intégration pour le bon fonctionnement et la fécondité du SCPÉ. La métaphore biologique de la “cellule” nous sera d’une grande utilité.
Premier niveau: l’intégralité cellulaire
Tout comme la cellule biologique est l’unité fondamentale du vivant, on peut dire que la cellule d’évangélisation est l’unité fondamentale du SCPÉ. La cellule est en elle-même une totalité. Elle a besoin de se nourrir pour croître sainement. Elle est conçue pour se démultiplier, signe de son évidente vitalité. Ainsi, la cellule d’évangélisation se distingue essentiellement et par définition de tout autre groupe chrétien. Elle intègre au plus intime d’elle-même le dynamisme de multiplication. Sans cette vision claire et cette définition précise de la “cellule d’évangélisation”, on ne fait que multiplier confusions et ambiguïtés , pertes de temps et fausses espérances. C’est pour cette raison que la cellule a besoin de se rencontrer régulièrement (hebdomadairement) pour se nourrir en fonction des quatre dimensions de la vie chrétienne (fraternité, louange, parole de Dieu, témoignage). Elle croît en accueillant de nouveaux convertis et elle se multiplie par le phénomène de la mitose pour reproduire et amplifier le mouvement d’évangélisation. Ainsi, la cellule d’évangélisation prise en elle-même est une totalité intégrée et intégrative.
Deuxième niveau: l’intégration ecclésiale
Tout comme la cellule biologique est liée à un corps plus vaste sans lequel elle ne peut vivre, la cellule d’évangélisation est en relation vivante avec la paroisse reconnue comme corps ecclésial vivant la mission évangélisatrice pour la croissance de l’Église. Nous savons que la cellule meurt si elle se détache du corps et que le corps est en bonne santé dans la mesure même où chaque cellule l’est aussi. De plus, chaque cellule biologique est en bonne santé parce qu’elle accomplit une tâche, une fonction ou un service pour elle-même et pour l’ensemble du corps. Peut-on imaginer une cellule qui soit inutile à l’ensemble du corps? Il en est de même avec la cellule d’évangélisation. On peut vérifier la qualité d’une cellule et son union au corps par les services qu’elle entretient avec lui. Chaque cellule est appelée à développer charismes, talents et services pour le bien du corps ecclésial. Chacune peut bénéficier des charismes, talents et services du corps entier. À ce deuxième niveau d’intégration, nous voyons mieux le caractère interactif et intégratif du corps ecclésial en relation avec chaque cellule d’évangélisation.
Troisième niveau: l’intégration pastorale
Tout comme le corps biologique, qui développe un nombre incalculable de cellules, a besoin d’une intelligence pour coordonner la croissance en harmonisant au fur et à mesure le développement des membres, des organes et des systèmes, le corps ecclésial qui évangélise doit lui aussi organiser, de manière sage et équilibrée, le développement des cellules d’évangélisation sous le regard du pasteur. Le pasteur a la “vision”: 1- de la cellule comme totalité, 2- du développement du corps ecclésial et 3- de l’intégration pastorale des deux niveaux précédents. Le pasteur doit, non seulement porter et incarner la “vision” du SCPÉ, mais aussi la communiquer constamment et régulièrement au fur et à mesure du développement des cellules d’évangélisation et du corps ecclésial. Il doit s’assurer que l’ADN se reproduise fidèlement en fonction de la multiplication cellulaire. Son souci principal sera de maintenir une structure de formation des leaders au sein de laquelle l’accompagnement interpersonnel aura une place primordiale. Cet ADN du SCPÉ se transmet à la fois par les sessions de formation et par la relation interpersonnelle où la “redevabilité” permet de maintenir l’obligation, pour chaque leader, de rendre compte aux différents niveaux de la structure pastorale.
Si le pasteur est vraiment porté par la “vision” du SCPÉ, l’intégration pastorale se vivra de manière harmonieuse et équilibrée, dans la perspective même de ce que Paul avait entrevu en contemplant le Corps du Christ en croissance. Il écrivait aux Éphésiens: “”…Mais, confessant la vérité dans l’amour, nous grandirons à tous égards vers Celui qui est la Tête, Christ. Et c’est de lui que le corps tout entier, coordonné et bien uni grâce à toutes les articulations qui le desservent, selon une activité répartie à la mesure de chacun, réalise sa propre croissance pour se construire lui-même dans l’amour…” (Ép 4, 15-16). Cela est possible dans la mesure où le pasteur privilégie, non seulement l’objectif de l’évangélisation et de la spiritualité de communion au sein de la cellule, mais aussi et surtout l’objectif de la formation chrétienne, en se concentrant sur les leaders qui pourront multiplier cette formation au sein du système cellulaire et de l’ensemble de la communauté paroissiale. Dans un contexte semblable à celui du passage précédent, Paul écrivait: ” …afin de mettre les saints en état d’accomplir le ministère [littéralement: en vue de la formation des saints, pour accomplir l’oeuvre du ministère…], pour bâtir le Corps du Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous ensemble à l’unité dans la foi et dans la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’adultes, à la taille du Christ dans sa plénitude” (Ép 4, 12-13).
Conclusion
Cette vision de croissance qui parcourt tout le Nouveau Testament et qui est particulièrement synthétisée dans ce passage dense et profond de la lettre aux Éphésiens (cf 4, 11-16) est accueillie dans le coeur du pasteur pour la vie et le développement de sa communauté paroissiale. Ainsi, plus qu’une méthode, le SCPÉ est une vision parfaitement biblique et ecclésiale. Porté par cette vision, le pasteur pourra trouver en lui les ressources de grâce qui lui donneront la capacité d’entreprendre cette aventure pastorale de l’évangélisation dans une dynamique de croissance et de multiplication. La vision biblique de la croissance transmise par le SCPÉ n’est pas lourde à porter. Si la vision vient de Dieu, elle entraîne et stimule, elle donne courage, enthousiasme et passion. Elle est cependant exigeante parce qu’elle demande une conversion pastorale pour vivre, avec compétence et amour, le don de soi absolu au service du Christ et de l’Église. Le ministère du pasteur engagé dans le SCPÉ n’a d’autre objectif que d’actualiser et d’appliquer ce que Paul lui-même a vécu auprès des chrétiens de Colosses: “accomplir la parole de Dieu” (Col 1, 25, trad. litt.) pour que l’Évangile “porte du fruit et croisse dans le monde entier” (Col 1, 6).
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