“L’amour fraternel, c’est la plus grande évangélisation” « C’est beau de voir une communauté qui avance unie, dans laquelle les membres s’aiment ; l’amour fraternel, c’est la plus grande évangélisation… Le monde, tout comme l’Eglise, a besoin de toucher cet amour fraternel nonobstant la diversité », a affirmé le pape François aux participants du Chapitre Général de la Société du Verbe Divin – Missionnaires Verbites – qu’il a reçus le 22 juin 2018 au Vatican.
Les missionnaires de la Société du Verbe divin, fondés par le prêtre allemand saint Arnold Janssen (1837-1909) sont présents dans 180 pays. « L’envoi missionnaire ne connait ni frontière ni culture, parce que tout le monde est terre de mission », leur a dit le pape au cours de cette audience.
Voici notre traduction intégrale de son discours.
Discours du pape François
Chers frères et chères sœurs,
Avant tout permettez-moi de saluer le Supérieur Général et de le remercier pour les paroles qu’il m’a adressées au nom de toute la Société du Verbe Divin. Je vous souhaite la bienvenue et je voudrais exprimer ma joie d’être avec vous, à l’occasion du chapitre général. Un chapitre général constitue toujours un moment de grâce pour toute la famille du Verbe, ainsi que pour l’Eglise et le monde entier. Etant donné qu’il s’agit de suivre avec fidélité le Christ, demandons l’assistance de l’Esprit Saint, « le père des pauvres », comme aimait le dire Saint Arnold Janssen.
Le thème qui guide vos travaux a une saveur paulinienne et missionnaire : « ‘L’amour du Christ nous saisit’ (2 Cor 5,14) : Enraciné dans le Verbe et Engagé dans Sa Mission ». C’est l’amour du Christ qui nous saisit au renouvellement personnel et communautaire pour renforcer l’engagement à sortir et à annoncer l’Evangile. Pour cela il sera nécessaire de se retourner et de regarder les racines, de voir où vous êtes enracinés, quelle est la sève qui donne la vie à votre communauté et aux œuvres que vous réalisez, dans toutes les parties du monde où vous êtes présents. De ce regard sur les origines, je voudrais réfléchir à trois mots : confiance, annonce, et frères.
En premier lieu, la confiance. Confiance en Dieu et en sa divine Providences, parce que se savoir abandonné entre ses mains est essentiel dans notre vie de chrétiens et de consacrés. Jusqu’où va notre confiance en Dieu, dans son amour providentiel et miséricordieux ? Sommes-nous disposés à prendre des risques, à être courageux et décidés dans notre mission ? Saint Arnold était convaincu que dans la vie d’un missionnaire il n’y a rien qui puisse justifier le manque de courage et de confiance en Dieu. Ne permettons pas qu’entre nous, qui avons expérimenté l’amour de Dieu, il y ait la peur et fermeture, ni que nous mettions des freins et des obstacles à l’action de l’Esprit. Conscients du don reçu, de « tant de preuves de l’aide divine », je vous encourage à renouveler la confiance dans le Seigneur et à sortir sans peur, à donner un témoignage de la joie de l’Evangile, qui rend heureux tant de gens. Que cette confiance dans le Seigneur, renouvelée tous les jours dans la rencontre avec Lui dans la prière et dans les sacrements, vous aide aussi à être ouverts au discernement, pour examiner votre vie, en cherchant à faire la volonté de Dieu dans toutes vos activités et tous vos projets.
Le deuxième mot est : annonce. Dans votre charisme il est essentiel de proclamer la Parole de Dieu à tous les hommes, en tous lieux et tous temps, en vous servant de tous les moyens possibles, en formant une communauté de disciples et de missionnaires unis entre eux et avec l’Eglise. Dans le cœur de tous les membres du Verbe, ces paroles de Saint Paul doivent brûler comme un feu qui ne s’éteint pas : « Malheur à moi si je ne prêche pas l’Evangile ! » (1 Cor 9,16). Cela a été la préoccupation de tant de missionnaires qui vous ont précédé, cela a été le flambeau qu’ils vous ont transmis et aujourd’hui le défi que vous avez devant vous. Votre fondateur à pensé à vous en tant que missionnaires ad gentes. « Allez de par le monde et prêchez l’Evangile » (Mc 16, 15). L’envoi missionnaire ne connait ni frontière ni culture, parce que le monde entier est terre de mission.
Même s’il y a un peu de désordre, l’important est d’y aller, ensuite l’ordre viendra, plus tard. Mais la vie missionnaire est toujours désordonnée. Il y a une seule sécurité pour l’ordre : la prière. Avec la prière on va de l’avant.
Chers frères : vous êtes ancrés dans la parole de Dieu, enracinés en elle, si vous l’assumez comme fondement de votre vie et laissez la parole de Dieu brûler en votre cœur (Cf Lc 24,32) ; cette parole petit à petit vous transformera et fera de chacun d’entre vous un vrai missionnaire. Vivez et laissez-vous sanctifier par la Parole de Dieu, vivez pour elle.
Le troisième mot que je propose est frères. Nous ne sommes pas seuls, nous sommes l’Eglise, nous sommes un peuple. Nous avons des frères et des sœurs à nos côtés, avec lesquels nous parcourons le chemin de la vie et de notre propre vocation. Une communauté de frères unis dans le Seigneur, qui s’attirent et se rassemblent, en acceptant quiconque en tant que personne, sans que nous cessions d’être nous-même. Recevez la force et la joie de Dieu pour rester fidèles et pour faire la différence, en suivant le chemin qu’il nous indique : « aimez-vous les uns les autres » (Jn 13,34). C’est beau de voir une communauté qui avance unie, dans laquelle les membres s’aiment ; c’est la plus grande évangélisation. Même si vous vous disputez, même si vous discutez, parce que dans toute bonne famille on s’aime et on se dispute, on discute. Mais après il y a l’harmonie et c’est la paix. Le monde, tout comme l’Eglise, a besoin de toucher cet amour fraternel nonobstant la diversité et la multi culture, qui est une des richesses que vous avez. Une communauté, dans laquelle les prêtres, les religieux et les laïcs se sentent membres d’une famille, dans laquelle on partage et on vit la foi dans un même charisme, dans laquelle tous sont au service des autres et personne ne vaut plus qu’un autre.
Ainsi vous pouvez affronter les difficultés quelles qu’elles soient, avec l’objectif d’aller rencontrer les autres frères qui sont dehors, exclus de la société. Nous vivons dans une culture de l’exclusion, une culture du rebut. Il faut sortir pour aller à la rencontre de ces frères exclus, abandonnés à leur destin, piétinés par des intérêts égoïstes…. Même eux sont nos frères qui ont besoin de notre aide et ont besoin d’expérimenter la présence de Dieu qui va à leur rencontre. Là aussi vous êtes envoyés pour traduire dans la réalité l’esprit des Béatitudes à travers les œuvres de miséricorde : en écoutant et en donnant une réponse aux cris de ceux qui demandent pain et justice ; en portant la paix et la promotion intégrale à tous ceux qui cherchent une vie plus digne ; en consolant et en offrant des motifs d’espérance aux tristesses et aux souffrances de beaucoup d’hommes et de femmes de notre temps… Que ceci soit la boussole qui oriente vos pas de frères missionnaires.
Deux choses. La première, les origines. Les origines ce n’est pas seulement une histoire, ce n’est pas une chose, ce n’est pas une spiritualité abstraite. Les origines ce sont des racines et pour que les racines puissent donner vie il faut en prendre soin, il faut les arroser. Il faut les regarder et les aimer. Je vous ai dit de rester enracinés dans les origines, c’est-à-dire que vos origines soient des racines qui vous fassent grandir. La seconde chose n’est pas une pensée lugubre. Pensez aux cimetières. Aux cimetières des régions lointaines, en Asie, en Afrique, en Amazonie…. Tant des vôtres sont là et sur les inscriptions on lit qu’ils sont morts jeunes, parce qu’ils ont risqué, ils ont pris le risque de leur propre vie. Racines et cimetières qui sont des racines pour vous aussi. Que Dieu vous bénisse, priez pour moi et n’oubliez pas : racines et cimetières. Merci.
Traduction de Zenit, Hugues de Warren
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