Introduction : Le jugement sur le péché…
…d’un moine
Un jeune homme d’une ville du nord de l’Allemagne, dans les années 1850, quoique élevé dans la religion catholique, ne croyait cependant ni en cette religion, ni en aucune autre. Il vivait dans la plus complète incrédulité, éloigné de toute pensée de Dieu, et surpassant en dépravation les plus endurcis d’entre ses compagnons de vice. Pourtant Dieu se servit de l’excès même de la perversité de ce jeune homme. Repris dans sa conscience, se voyant soudainement sous son vrai jour, une angoisse s’empara de lui. Il se dit : — « S’il est vrai que les méchants iront en enfer, et que le ciel n’est réservé qu’aux bons, mon sort n’est pas douteux ; l’enfer m’attend. Si jamais homme a mérité la perdition éternelle, c’est bien moi. » Cette pensée terrible le torture nuit et jour. Comment s’en distraire ? — En se replongeant plus profondément dans sa vie de péché ? Mais le vice a perdu tout attrait. Il se rappelle alors ce qu’on lui a raconté au sujet des couvents où, dit-on, des moines trouvent moyen d’expier leurs péchés par des œuvres méritoires et des mortifications excessives. Il demande où se trouve le couvent dont la règle est la plus sévère et les pénitences les plus dures. Il apprend qu’il la trouvera dans un monastère de la Trappe, loin de sa demeure.
Trop pauvre pour subvenir aux dépenses que nécessite ce voyage, il se résout à le faire à pied et à mendier sa subsistance en chemin. Cela lui semble déjà être un commencement de pénitence et un pas de gagné sur le chemin du ciel. Le voyage est long et pénible. Il parvient enfin en vue du monastère où il espère trouver le repos de son âme. Il sonne. Un vieux moine lui ouvre la porte. Que désirez-vous ? demande le vieillard. Être sauvé, répond le voyageur. Le vieux moine l’invite à entrer et le conduit dans un parloir : Maintenant, dit-il, dites m’en davantage. Eh bien ! Voici ce qui m’amène : Vous voyez devant vous un pécheur perdu. Dites-moi seulement ce que je dois faire pour être sauvé, et, quoi que ce puisse être, je le ferai.
Le vieux moine répondit : —Vous dites que vous êtes prêt à faire tout ce que je vous dirai. Eh bien ! Retournez tout droit chez vous, car tout ce dont vous me parlez a été expié avant que vous vinssiez, et il ne vous reste plus rien à faire. Un Autre a déjà souffert à votre place. Tout est accompli. Tout est accompli, dites-vous ? —Oui, tout. Ne savez-vous pas dans quel but le Sauveur est venu dans ce monde ? Il est venu pour endurer à notre place le châtiment que nos péchés nous ont attiré. Après être mort pour nos offenses, Il est ressuscité pour notre justification, ayant achevé l’œuvre que le Père Lui avait donnée à faire. Il ne pouvait pas Se reposer avant de l’avoir achevée. Elle est accomplie. Maintenant Il est retourné auprès de son Père. Il s’est assis à sa droite, et nous prépare une place, afin que là où Il est, nous y soyons aussi. Nous jouirons éternellement de Sa gloire ! Il ne vous reste donc rien à faire que de louer et remercier sans cesse notre Sauveur, de vous réjouir dans la pensée que vous Le rejoindrez et serez fait participant de Sa gloire, comme vous êtes actuellement l’objet de Sa grâce. Maintenant, allez, retournez chez vous, débarrassé de toute crainte, et souvenez-vous que Christ a dit : « C’est accompli ! »
… de Jésus
Alors, si cette histoire est vraie, que signifie cette phrase énigmatique de Jésus que l’Evangile nous a fait entendre : « Je suis venu pour rendre un jugement (κρίμα ) : que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. » (Jn. 9, 39) Le jugement de Jésus ne sera-t-il pas sur nos actes, comme l’enseigne l’Ancien Testament ? « Car Dieu amènera en jugement (בְמִשְׁפָּ֖ט) toutes les actions de l’homme, tout ce qui est caché, que soit bien ou mal. » (Qo. 12, 14) Ne devons-nous pas faire preuve de prudence, comme le dit encore ce beau livre ? « Réjouis-toi, jeune homme, dans ta jeunesse, sois heureux aux jours de ton adolescence, suis les voies de ton cœur et les désirs de tes yeux, mais sache que sur tout cela Dieu te fera venir en jugement (בַּמִּשְׁפָּֽט). » (Qo. 11, 9)
1. Le jugement de Dieu…
… à la fin des temps
Dans l’Apocalypse, deux jugements sont prononcés :
- Le premier est un jugement intermédiaire, un délai accordé à la terre où le « Dragon » (le diable) sera enchaîné et l’Eglise connaîtra un renouveau. C’est la phase terrestre du règne de Dieu et du Christ. Ce jugement est remis par Dieu aux vingt-quatre vieillards, des anciens qui partagent Son pouvoir avant le jugement final : « Puis je vis des trônes sur lesquels ils s’assirent, et on leur remit le jugement. » (Ap. 20, 4)
- Le deuxième est un jugement où chacun sera jugé « selon ses œuvres ». (Ap. 4, 13) Les uns se trouveront inscrits « dans le livre de vie » et les autres jetés « dans l’étang de feu ». (Ap. 20, 15)
… sur les actes issus de la loi ?
Etre jugé « selon ses œuvres », est-ce un jugement sur toutes nos actions, comme le dit le livre du Qohélet ? Certainement, la Bible ne se contredit pas. Mais quelles sont les actions bonnes et les actions mauvaises ? Cette histoire que nous avons entendue, peut-être imaginaire, est éclairante, de même que cet évangile :
- Les pharisiens pensent que l’action bonne consiste à observer la loi de Moïse. C’est vrai et cela leur permet de condamner Jésus : « Il ne vient pas de Dieu, cet homme-là, puisqu’Il n’observe pas le sabbat. » (Jn. 9, 16) Jésus, en effet, a guéri un jour de Sabbat où l’on n’est pas censé « travailler ». Guérir, c’est travailler.
- Mais cette loi qu’ils prétendent suivre – « C’est de Moïse que nous sommes les disciples », disent-ils (Jn. 9, 28) – ils ne l’observent pas. Ils ne sont donc pas disciples de Moïse.
- Paul le leur dira plus tard : « Toi, qui arbores le nom de Juif, […] tu prêches de ne pas dérober, et tu dérobes ! tu interdis l’adultère, et tu commets l’adultère ! » (Rm. 2, 17. 21)
- L’homme pécheur dont nous avons entendu le récit, sait ses actions mauvaises.
- Il connait « le verdict de Dieu qui déclare dignes de mort les auteurs de pareilles actions ». (Rm. 1, 32) Il a peur de l’enfer.
- L’action bonne n’est appliquée par personne ! « Il n’y a pas de différence : tous ont péché », (Rm. 3, 23) dit S. Paul.
- La conséquence est grave : « Tous […] sont privés de la gloire de Dieu. » (Rm. 3, 23)
2. Le jugement inattendu de Dieu…
… c’est Sa grâce
Si « toute bouche [doit] être fermée et le monde entier reconnu coupable devant Dieu », (Rm. 3, 19) la justice de Dieu invente, pour ainsi dire, la grâce. La justice de Dieu, comme les tribunaux humains, connaît « le droit de grâce ». « Tous sont justifiés – acquittés – par la faveur de Sa grâce. » (Rm. 3, 24)
- C’est le propos que tient au pénitent le moine qui l’a reçu : « Il ne vous reste donc rien à faire que de louer et remercier sans cesse notre Sauveur, et de vous réjouir dans la pensée que vous Le rejoindrez et serez fait participant de Sa gloire comme vous êtes actuellement l’objet de Sa grâce. »
… demande une réponse
Ce propos est magnifique. Mais ne reste-t-il vraiment rien à faire ?
- Le moine a bien précisé qu’il reste un devoir de louange : « Il ne vous reste donc rien à faire que de louer et remercier sans cesse notre Sauveur. »
- La louange peut aller plus loin encore, jusqu’à l’adoration. C’est l’acte si grand de l’aveugle. Alors que Jésus se révèle à lui, il déclare : « “Je crois, Seigneur“, et il se prosterna devant Lui. » (Jn. 9, 38)
Conclusion : Le jugement de Jésus…
… sur les œuvres de l’homme
Jésus, au terme de cette histoire, déclare qu’Il est venu « rendre un jugement ». (Jn. 9, 39) Se pourrait-il que le jugement final où les uns sont inscrits « dans le livre de vie » et les autres jetés « dans l’étang de feu », (Ap. 20, 15) soit déjà en marche ?
- Sur la base de quelles œuvres puisque : « c’est bien par grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi » ? (Ep. 2, 8)
- Sur la base de quelles œuvres puisque : « ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu » ? (Ep. 2, 8)
- Sur la base de quelles œuvres puisque : « [ce salut] ne vient pas des œuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier » ? (Ep. 2, 9)
… sur les œuvres de la foi
Paul dévoile le mystère des œuvres agréées par Dieu. Ce sont celles-là mêmes de Dieu : « Nous sommes en effet Son ouvrage, créés dans le Christ Jésus en vue des bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance pour que nous les pratiquions. » (Ep. 2, 10) Ces œuvres sont celles de la foi. Nous en avons une liste impressionnante au chapitre 11 de l’épître aux Hébreux : l’œuvre de la foi d’Abel, d’Hénoch, de Noé, d’Abraham, de Sara, d’Isaac, de Joseph, de Rahab, la prostituée, de Gédéon, Baraq, Samson, Jephté, David, Samuel, etc.
… sur l’œuvre de l’aveugle-né
L’œuvre bonne préparée d’avance par Dieu pour que l’aveugle-né la pratique est aussi celle de la foi. Il peut désormais dire les paroles de Paul : « Ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et S’est livré pour moi. » (Gal. 2, 20) Pouvons-nous le dire aussi ? Mieux encore : pouvons-nous le dire tout le jour en nous tenant en communion constante avec Lui ? Car c’est cela l’œuvre excellente : faire tout avec Lui et rien sans Lui, vivre avec Lui et non sans Lui. Sommes-nous prêts à être jugés sur ce critère-là ? Si oui, nous aurons su « juger ce qui est plait au Seigneur » (Ep. 5, 10), car ce qui Lui plait est bien que nous vivions avec Lui et non sans Lui.
Prions : « Seigneur, donne-moi de vivre de la foi. »
Oraison jaculatoire : « Je vis par la foi ! »
Suggestion : Vivre une action ordinaire de votre vie dans la foi.
Question : Qu’est-ce qu’une action faite dans la foi ?
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