4 caractéristiques du témoignage chrétien

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Introduction : Le témoignage

…de S. Henry Walpole

Le manoir d’Anmer Hall, la nouvelle résidence du duc et de la duchesse de Cambridge dans le Norfolk, serait hanté par le fantôme d’un martyr catholique, Sir Henry Walpole, rapporte Paris-Match, le 22 décembre 2014. Saint Henry Walpole, né en 1558 dans le Norfolk, meurt, le 7 avril 1595, à York. Henry, prêtre jésuite Anglais, fut exécuté pour son attachement indéfectible à la foi catholique. Canonisé en 1970 par Paul VI, avec les autres martyrs d’Angleterre et Galles, il est commémoré le 7 avril. De parents aisés, il fit ses études à l’école de Norwich, puis à Peterhouse, Cambridge, comme étudiant en droit. En 1578, avocat, il s’installa à Gray’s Inn (Londres). Lorsqu’Edmond Campion fut exécuté le 1er  décembre 1581, Henry Walpole se trouvait dans la foule des spectateurs.  Le jeune homme de 23 ans avait assisté aux débats d’Edmond Campion avec les théologiens anglicans. Il estimait devoir être présent à l’exécution d’un tel témoin de la foi catholique. Lorsque le corps écartelé du martyr fut jeté dans l’eau bouillante, une goutte de son sang macula le vêtement de Walpole. Celui-ci en fut si profondément ému qu’il y vit l’intervention de Dieu[]. Il devint Catholique, abandonna le Droit et décida de devenir prêtre. Pour ce faire il rejoignit le collège anglais de Reims, continua sa formation au collège anglais de Rome pour entrer dans la Compagnie de Jésus le 2 février 1584. Ordonné prêtre le 17 décembre 1588, il est envoyé comme aumônier des troupes espagnoles dans les Pays-Bas. Il y est fait prisonnier par les Calvinistes en 1589, et passe un an en prison à Flushing. Libéré, il est envoyé dans les séminaires anglais de Séville et Valladolid. Ce n’est qu’en 1593 que son désir de rentrer comme missionnaire dans son pays natal lui est accordé.  Après 10 jours de voyage, lui-même, son frère et un soldat anglais débarquent la nuit du 4 décembre 1593 dans le Yorkshire. Il a à peine fait une dizaine de kilomètres sur la route de York qu’il est arrêté à Kelham. Il a été trahi par un passager Ecossais. Transféré à la prison de York, on l’autorise à sortir des murs pour débattre avec des théologiens anglicans. On cherche à le faire abjurer sa foi catholique. Topcliffe, connu comme le “bourreau des prêtres“, vient spécialement dans ce but. Mais Walpole ne fléchit pas. Il est transféré à la tour de Londres par Topcliffe, persuadé qu’il parviendra à le faire apostasier. Durant son incarcération, Walpole est torturé de manière particulièrement brutale et raffinée, car bien que torturé une quinzaine de fois on évitait, à l’instigation de Topcliffe, que cela conduise à une mort prématurée. Les tortures durent un an. On le tente. Il peut vaquer à son ministère autrement qu’en prison. Il répond à ses geôliers : «  Ceci est mon […] « Domine quo vadis ? » (Jn.13, 36) [« Seigneur, où vas-tu ?]  Pour dire la vérité, je ne vois pas comment je peux faire autrement que de lutter pour ce prix et cette récompense vers lesquels nous courrons tous, ni comment je pourrais plus utilement être employé ailleurs puisque j’ai ici les moyens de faire profession [témoigner] de ce que je suis et de recevoir des visites de personnes qu’autrement je ne pourrais avoir. » (Thomas M. MCoog, The society of Jesus in Ireland, Scotland and England, 1589-1597, ed. Routledge, 2016, p. 156)

… de Jean le Baptiste

Jean le Baptiste rend aussi témoignage. « Il est venu comme témoin (μαρτυρίαν), avons- nous entendu, pour rendre témoignage (μαρτυρήσῃ)  à la Lumière, afin que tous croient par Lui. » (Jn. 1, 7) Les apôtres sont aussi appelés au témoignage : « Mais vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors Mes témoins (μάρτυρες) […] jusqu’aux extrémités du monde. » (Ac. 1, 8) Dans les Cellules paroissiales d’Evangélisation, chaque semaine les membres se posent à eux-mêmes la question : « Comment ai-je témoigné de Jésus autour de moi cette semaine ? » Toute l’Eglise n’a qu’un seul but, nous disait le Concile Vatican II : rendre témoignage. « [L’Eglise] ne vise qu’un seul but : continuer, sous l’impulsion de l’Esprit consolateur, l’œuvre-même du Christ, venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. » Comment le Baptiste rend-il témoignage ?  Comment le Christ rend-il témoignage ? Comment le saint rend-il témoignage ? Qu’est-ce que rendre témoignage, tout particulièrement en ce temps préparatoire à Noël ?

1. Les caractéristiques du témoignage…

            Le témoignage évangélique a des caractéristiques qui lui sont propres.

  1. L’effacement.
  • Cette caractéristique de l’effacement est particulièrement claire chez Jean le Baptiste :
  • Le Baptiste rend témoignage tout d’abord par des dénégations: Il n’est pas le Christ, (Jn. 1, 20) il n’est pas Elie, (Jn .1, 21), il n’est pas « le Prophète » qui doit venir. (Jn. 1, 21)
  • Il est simplement « une voix » et une voix qui appelle au repentir. (Jn. 1, 23)
  • Son baptême est sans puissance, il baptise simplement « dans l’eau », (Jn. 1, 26) un signe pour aider ceux qui veulent « redresser le chemin du Seigneur ». (Jn. 1, 23)   
  • En effet, Celui dont il n’est pas même digne de « dénouer la courroie de sandale », (Jn. 1, 27), Celui « qui baptise dans l’Esprit Saint » (Jn. 1 ,33) se tient là, inconnu.
  • La caractéristique du témoignage du Baptiste est donc une tentative de tourner les regards vers Celui qui vient et n’est pas encore connu, en s’effaçant : « Il faut qu’Il croisse et que je diminue. » (Jn. 3, 30)
  • Cette caractéristique de l’effacement se retrouve chez Jésus.
  • Il ne se rend pas témoignage à Lui-même: « Je ne Me rends pas témoignage à Moi-même. Si je Me rends témoignage à Moi-même,  Mon témoignage n’est pas valable. » (Jn. 5, 31) Le Baptiste a témoigné pour Lui, (Jn. 5, 33) mais « un Autre témoigne de Moi ». (Jn. 5, 32)
  • Les scribes et les Pharisiens L’accuseront de se rendre témoignage à Lui-même : « Tu Te rends témoignage à Toi-même (σεαυτοῦ μαρτυρεῖς), Ton témoignage (μαρτυρία) n’est pas valable. » (Jn. 8, 13)
  • A quoi Jésus répond sans ambiguïté que le Père Lui-même témoigne pour Lui: « Pour Moi témoigne (μαρτυρεῖ) le Père qui m’a envoyé. » (Jn. 8, 18)
  1. La prudence.
  • Jésus n’a pas révélé ce témoignage du Père dès l’abord, parce que le témoin est prudent. Il se doit de convaincre.
  • C’est ce que fera Henry Walpole. Son approche était simple : « Mon raisonnement était toujours ajusté au tempérament [de mon interlocuteur] avec l’intention et le désir de l’amener à un plus haut niveau dans le service de Dieu. […] Pour arriver à ce but, j’ai toujours considéré que les moyens les meilleurs étaient […] la douceur et la consonance à la vocation à laquelle j’avais été appelé, essayant d’éviter, autant que je le pouvais, la trop grande rigueur et l’esprit de dispute. » (Thomas M. MCoog, ibidem, p. 157)
  1. La contestation.
  • Jésus est contesté tout au long de Sa vie publique, y compris à la croix !
  • Paul sera contesté. Jésus le lui annonce : « De retour à Jérusalem, il m’est arrivé, un jour que je priais dans le Temple, de tomber en extase. Je vis le Seigneur, qui me dit : “Hâte-toi, sors vite de Jérusalem, car ils n’accueilleront pas ton témoignage (μαρτυρίαν) à Mon sujet. » (Ac. 22, 18)
  • Etienne et tous les martyrs de la foi sont contestés, dont Henry Walpole, qui se déclare ignare, mais dont le talent apologétique rend coi ses adversaires.
  1. L’accréditation universelle.
  • Quand bien-même un témoignage est contesté, le temps permet souvent un accueil universel du témoignage du juste. C’est ce que fait entendre S. Jean à Gaïus, à propos de Démétrius : « Quant à Démétrius, tout le monde lui rend témoignage (μεμαρτύρηται ὑπὸ πάντων). » (3 Jn. 1, 12)
  • Quelques siècles après, avec quarante martyrs d’Angleterre et de Galles, Walpole est canonisé par Paul VI, le 25 octobre 1970.

L’idéal du témoin…

            Ce qui importe au témoin n’est pas tant d’emporter la conviction de ses adversaires que de « posséder le témoignage de Jésus » en son cœur : « Le Dragon s’en alla guerroyer contre […]  ceux qui gardent les commandements de Dieu et possèdent (ἐχόντων) le témoignage de Jésus. » (Ap. 12, 17) Ce verbe est typique de l’Apocalypse où il est dit des « frères » qu’ils « possèdent le témoignage de Jésus » (Ap. 19, 10) Il y a des signes de cette possession du témoignage en son cœur :

  • La paix. Alors qu’Henry Walpole déclare avant de mourir, à la question de ses bourreaux, qu’il s’oppose à la suprématie de la Reine d’Angleterre Elisabeth sur l’Eglise, il les assure aussi que, selon leurs souhaits,  « il meurt en paix  avec le monde entier et priait pour tous, particulièrement pour ceux qui étaient la cause de sa mort, que Dieu les éclaire de sa vérité, les ramène à l’Eglise et les dispose à recevoir Sa miséricorde ». (Mgr R. Challoner, Memoirs of missionary priests, 1, Ed. John T. Green, 1839,  p. 203)
  • Le calme. Selon S. Pierre. L’âme « douce et calme » (1 P. 3, 4) gagne un mari opposé à la foi plus efficacement encore que la parole. 
  • La débonnaireté. Henry Walpole dit à ses bourreaux qu’il a passé sa première année chez les Jésuites à s’exercer à l’humilité. L’âme humble peut se définir par son contraire, l’âme présomptueuse, que décrit Wesley dans un sermon. Au lieu d’être débonnaire, elle est arrogante, « incapable de supporter une remarque, [impatiente] de la contradiction ». 

Conclusion : Le témoignage de Jésus…

En ce dimanche dit du « Gaudete » (« Réjouis-toi), la liturgie elle-même nous interroge : Possèdes-tu en toi le « témoignage de Jésus », à savoir, les fruits de l’Esprit de Jésus (douceur, joie, paix, etc.) Que te dit ton cœur ?

Prions : « Seigneur, donne-nous de “témoigner“ de plus en plus par notre être, nous T’en prions. Amen. »

Oraison jaculatoire : « Venez Trinité Sainte en mon cœur ! »

Question : Ai-je témoigné de Jésus par mon être cette semaine ?

Suggestion : Maintenir son cœur dans les fruits de l’Esprit.

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A propos Geoffroy de Lestrange 75 Articles
Le père de Lestrange, curé dans le monde rural, a fait ses études supérieures aux États-Unis. Il y a découvert le Renouveau charismatique catholique ainsi que les églises évangéliques. Bénédictin, puis profès simple chez les frères de Saint-Jean, il a découvert par ces contacts divers, l'importance de la prière pour une nouvelle Pentecôte dans l'Église, souhaitée par tant de papes.

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