Croyons-nous en un Dieu vivant et personnel, en un Dieu que l’on peut rencontrer ou en une idée de Dieu ? Günther Dürrmeier croyait en « une énergie » ou, comme le disent les philosophes, en « un premier principe, que l’on appelle Dieu ». Il raconte : « Je suis né à Münich en 1925, j’ai été baptisé dans l’église protestante luthérienne (…) Pour moi, il existait bien une « puissance supérieure », une « force dans le ciel », qui fait que les « étoiles ne s’entrechoquent pas » mais je ne croyais pas en un Dieu personnel et encore moins en une relation personnelle et vivante avec Lui. J’étais heureux dans mon mariage et ma vie professionnelle… mais je commençais à me poser des questions sur le sens de la vie et ce qui se passe après la mort. (…) Et dans la paroisse où j’étais il n’y avait que très peu de place pour une expérience pratique et une foi personnelle en un Dieu vivant » (Voix, n°1/2001 p.14-15).
Günther et cette paroisse étaient dans la situation de ces sadducéens qui contestent que Dieu est un Dieu des vivants : « Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ! » (Lc.20, 38).
Cette situation n’est-elle pas celle de nos communautés aussi ? Combien viennent à l’Église parce qu’ils ont soif de rencontrer un Dieu vivant qui écoute les prières, qui guérit, qui ressuscite les morts, qui intervient dans la vie des hommes, mais ils repartent quelque peu déçus parce que l’heure passée à l’église n’a pas réellement changé quelque chose à leur vie.
Que faut-il pour que chacun trouve non seulement une « espérance après la mort » comme le souhaitait Günther, mais une espérance pour maintenant, dans ce quotidien souvent si sombre ? Que faut-il pour que chacun, comme le dit S. Paul dans l’épître que nous venons d’entendre, fasse l’expérience d’un Dieu qui réconforte ? « Laissez-vous réconforter par notre Seigneur Jésus-Christ Lui-même et par Dieu notre Père » (2 Thess. 2, 16).
La première des choses, me semble-t-il, est de comprendre le Dieu de la Bible. Le Dieu de la Bible n’est pas le Dieu des philosophes. Il n’est pas une idée. C’est ce que Jésus tient à faire comprendre en soulignant qu’Il n’est pas le Dieu d’un « groupe », pas même d’une famille, mais Il est le Dieu de quelqu’un : « Dieu d’Abraham ». Et pour bien se faire comprendre, Il répète: « Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob » (Lc.20, 37).
Les patriarches que Jésus cite n’ont donné leur foi à Dieu que parce qu’Il était un Dieu qui intervenait dans leur vie, à la différence des dieux païens, impuissants à protéger de quoi que ce soit. Jacob ne donnera sa confiance au Dieu qui lui est apparu à Béthel que s’Il le protège efficacement : « Si le Seigneur est avec moi et me protège sur ma route, s’Il me donne de quoi manger et m’habiller, si je reviens sain et sauf chez mon père, alors le Seigneur sera mon Dieu… et c’est à Lui que je donnerai le dixième de tout ce qu’Il m’accordera » (Gn.28, 20).
C’est précisément parce qu’Il est un Dieu qui protège de la faim et de la soif, des ennemis et de la maladie que le Seigneur est désolé quand son peuple échange « sa Gloire contre l’Impuissance » (Jr.2, 11) abandonne la « Source d’eau vive pour se creuser des citernes, citernes lézardées qui ne tiennent pas l’eau » (Jr.2, 13).
Que faut-il encore pour que chacun fasse l’expérience d’un Dieu qui sauve ? Il faut :
Faire l’expérience de son indigence. Les sadducéens et les pharisiens qui interrogent Jésus ont beaucoup de mal à croire parce qu’ils n’ont pas fait l’expérience de la précarité de la vie. Günther Dürrmeier a mis du temps à venir à la foi parce que, comme il le dit lui-même, tout lui réussissait. Et c’est pourquoi Jésus déclare heureux ceux qui font concrètement l’expérience de leur indigence, comme les pauvres. Ceux-là sont prêts à accueillir Celui qui sauve : « Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous » (Lc.6, 20).
Faire un pas. Pour rencontrer le Dieu vivant, Günther Dürrmeier fait un pas : Il prie avec sincérité. Il en témoigne : « J’ai prié Dieu à genoux, chaque soir, pendant trois semaines pour que (ce que je pressentais être la vérité) devienne une conviction non seulement dans ma tête, mais aussi dans mon cœur. Durant la dernière nuit, Dieu a répondu à ma prière » (Voix, n°1/2001, p.15). Confusément, il pensait que si Dieu existait, Il récompensait ceux qui le cherchent. L’épître aux Hébreux nous invite à le croire : « Celui qui s’approche de Dieu doit croire …qu’Il récompense ceux qui le cherchent » (He.11, 6).
Faire deux et trois pas… Après avoir fait un pas, une difficulté peut faire obstacle à la persévérance. Il arrive alors que nous allions chercher ailleurs. Notre oreille nous démange et nous voulons entendre des nouveautés. Cette démangeaison est un risque connu : « Un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la sainte doctrine, mais au contraire, au gré de leurs passions et l’oreille les démangeant, ils se donneront des maîtres en quantité et détourneront l’oreille de la vérité » (2 Ti.4, 3). Il faut dont rester «inébranlablement attachés à la confession de notre espérance » (He.10, 3).
S’encourager les uns les autres chaque jour. L’homme qui veut rencontrer le Dieu vivant doit aussi fréquenter des gens qui vivent du Dieu vivant. L’épître aux Hébreux encourage même à les fréquenter assidûment pour «s’exhorter mutuellement chaque jour » (He.3, 13).
Ne pas se décourager. L’homme qui veut rencontrer le Dieu vivant peut s’imaginer que son péché ou son manque de foi rendent cette rencontre impossible. L’épître aux Hébreux souscrit à cet adage qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire : « Que l’un de vous n’estime (pas) arriver trop tard, alors qu’en fait la promesse ‘d’entrer dans son repos’ reste en vigueur » (He. 4, 1).
Enfin, celui qui veut rencontrer le Dieu « maître de l’impossible » doit rencontrer Jésus comme Dieu. Marthe a confiance en l’intercession toute puissante de Jésus pour son frère mort : « Seigneur, si Tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. Mais maintenant encore, je sais que tout ce que Tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera » (Jn.11, 21-22) mais elle n’a pas encore confiance en Jésus « vie et résurrection » (Jn.11, 25), Jésus, « maître de l’impossible », Jésus, Fils de Dieu et Dieu Lui-même. Jésus l’y pousse mais elle appelle sa sœur en secret comme si elle créditait Marie d’une foi qu’elle n’a pas encore malgré ce qu’elle déclare (cf. Jn.11, 27).
A l’inverse, la cananéenne ne doute pas que « le ciel est là où est Jésus » (Voix, n°002, p.27). Aussi ne quittera-t-elle pas sa présence tant qu’elle n’a pas été exaucée, ce qui lui vaut ce compliment : « Ô femme, elle est grande ta foi » (Mt.15, 28).
Cette femme prend le ciel, Jésus, d’assaut. Une sainte, Angèle de Foligno disait que Dieu aime qu’on lui fasse violence : « la prière violente est très agréable à Dieu » (Le livre de la bienheureuse Angèle de Foligno, éd. Quarachi, Grottaferrata, 1985, p.576).
Prions : « Seigneur, nous voulons Te rencontrer comme un Dieu « proche» (Ps.144,18). Donne-nous alors de T’invoquer avec une foi vive en ta présence, en ta puissance. Amen. »
Je crie : « Je t’invoque Seigneur, puisque Tu es proche » (Is.55, 6).
Seigneur, interviens dans ma vie!
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